« Je ne comprends pas, avec nous il est sage comme une image ! », « Dès qu'il est avec toi, il est infernal ! ». La nounou, les parents, les amis… vous avez tous déjà entendu cette réflexion d'un côté ou d'un autre. Même si elle vous fait grincer des dents, vous finissez par vous demander s'ils n'ont pas un peu raison après tout. C'est vrai, pourquoi votre enfant se permet certaines choses avec vous qu'il ne ferait pas aux autres ? Parce qu'il a 100% confiance en vous, tout simplement. C'est ce que démontre la théorie de l'attachement, comme nous l'explique Marie-José Sibille. Alors si votre enfant s'époumone dès la sortie de l'école, souriez, c'est une bonne nouvelle.
La théorie de l'attachement, c'est quoi ?
Au XXe siècle, le biologiste et zoologiste Konrad Lorenz a mis en évidence certaines théories applicables aux humains après avoir observé les animaux. En observant le comportement d'oisons et leur réaction à suivre systématiquement leur mère, il a pu constater qu'ils agissaient de la même manière avec tout objet mobile qu'ils pouvaient voir dès leur naissance, que ce soit leur mère ou pas. Ainsi, il définit la théorie de l'empreinte selon laquelle le premier regard que l'on porte sur un être en naissant définira la personne que l'on considèrera comme étant capable de répondre à tous nos besoins. C'est un réflexe primaire de sécurité. Plus tard, John Bowlby décrivît la théorie de l'attachement qui met en évidence le fait qu'un enfant s'accroche en priorité à une figure d'attachement, souvent la mère, qui sera le recours en cas de besoin, de peur ou de détresse affective et vers qui il se tourne pour réguler ses angoisses et chagrins. Il y a toujours une figure d'attachement prioritaire mais l'enfant peut aussi reconnaître des figures d'attachement secondaires, comme les pères et conjoints par exemple, qui peuvent répondre aux besoins de l'enfant avec une attitude suffisamment empathique et chaleureuse.
Il fait des crises car il se sent en sécurité avec vous
Le cercle familial est l'endroit où les enfants s'autorisent à se lâcher. La régulation du stress et des émotions est indispensable au bon développement du cerveau. Mais au contraire des adultes qui ont une capacité certaine à auto-réguler leurs émotions, les enfants n'en sont pas capables et ne développent certaine autonomie qu'à partir de l'adolescence.. La régulation est donc faite via les parents grâce à la relation secure qu'ils instaurent. Ainsi lorsque les enfants sont stressés ou frustrés, ils ne se permettent pas d'en faire une pleine démonstration à n'importe qui. Ils le font uniquement avec les parents car ils savent qu'ils seront les seuls à pouvoir accepter cela et à les aider. « Quand vos enfants se lâchent avec vous et pas avec les autres c'est parce qu'ils se savent en sécurité pour le faire, poursuit la psychothérapeute. Ce n'est pas un test de leur part et encore moins un signal d'alarme. C'est au contraire une réaction très saine. Donc il est vrai qu'ils n'agiraient pas forcément comme cela avec les grands parents, la nounou … mais c'est normal ! S'ils le font, cela veut dire qu'ils vous savent à même de répondre à leurs problèmes. » A l'inverse, certains enfants ne le font justement pas et cela signifie qu'il y a peut-être une carence affective, voire une maltraitance ou un traumatisme.
Accepter sa colère et prendre de la distance
Bien sûr, avoir une réaction parfaite en toute circonstance n'est pas une chose simple et innée et on ne peut pas toujours réagir de façon optimale. Nous avons d'ailleurs tendance à agir comme on nous l'a appris lorsque nous étions enfants. Ainsi, certains parents peuvent avoir besoin de travailler sur leur enfant intérieur pour se défaire de certains mécanismes qui ne sont pas toujours les meilleurs. Une réaction adaptée envers son bambin demande une vraie réflexion et une prise de distance de la part des parents qui doivent comprendre que ces colères ne sont pas intégralement tournées vers eux, même lorsqu'ils se pensent concernés. « Par ailleurs, avant l'adolescence, ne cherchez pas à stopper la réaction de votre enfant lorsqu'il laisse éclater son stress, sa frustration ou sa colère, note la psychothérapeute. Toute émotion de l'enfant est acceptable, aucune n'est mauvaise. Un enfant qui sort de l'école en colère et qui semble faire un caprice est en fait en situation de stress mais il n'a simplement pas le contenant suffisant pour son émotion qui déborde. » Ainsi, la priorité est de ne pas le laisser seul dans une situation difficile et d'essayer de mettre des mots sur sa réaction, tout en évitant de vous sentir impliqué dans la raison de sa colère.
La réaction appropriée
Quand l'enfant est en situation de stress, colère, ou frustration, on se sent parfois démuni. Suivez ces quelques conseils pour canaliser son énergie au mieux. « Mettez-vous à sa hauteur, prenez-le par les épaules, parlez-lui calmement et dites-lui « Je vois que ça ne va pas, je comprends. Est-ce-que tu veux en parler ? », préconise Marie-José Sibille. Cette simple réaction le calmera bien souvent. Si vous êtes trop en colère pour réagir de la sorte, expliquez-lui simplement que vous règlerez la situation plus tard lorsque vous serez plus calme car pour l'instant vous n'êtes pas capable de le faire. Ainsi, il n'y a pas de crescendo dans les cris. » La relation d’attachement, pour être sécure, nous demande d'adapter nos actes à nos sentiments et à nos paroles. Cette qualité fondamentale à développer par les parents s'appelle la congruence. Ainsi, quand votre enfant crie et vous énerve, ne lui criez pas dessus car vous serez contre-productif. En effet, il retiendra davantage vos gestes et attitudes que vos paroles. Mais si vous prenez toujours de la distance, même lorsque vous êtes énervé, vous êtes assuré de tendre au maximum vers la sérénité. Une belle manière de faire grandir votre enfant.
* Adopter sa famille, L'adoption internationale aujourd'hui, un exemple d'attachement résilient, Marie-José Sibille, Editions Books on Demand.